L’IA générative dans les missions de conseil : révolution ou simple outil ?

Il est encore trop tôt pour savoir si nous vivons une révolution. Mais il est déjà trop tard pour faire comme si rien ne changeait. Depuis plusieurs mois, les consultants sont confrontés à une évolution silencieuse mais significative de leur environnement de travail. Des solutions comme ChatGPT, Claude, ou Copilot se glissent dans les réflexes professionnels. Elles ne s’imposent pas d’emblée comme des bouleversements technologiques, mais agissent comme des catalyseurs : elles accélèrent, facilitent, déplacent. Faut-il y voir une révolution de nos métiers ? Ou devons-nous simplement apprendre à maîtriser un nouvel outil comme tant d’autres avant lui ?

Une promesse d’efficacité… à manier avec discernement

Dans les missions de conseil, une partie importante du temps est historiquement consacrée à la recherche, à la synthèse, et à la préparation de livrables. Or, sur ces trois dimensions, l’IA générative est bluffante. Elle peut proposer une première trame de note de synthèse, résumer un document dense, aider à reformuler ou traduire rapidement une idée.

Mais un consultant aguerri vous dira que c’est dans les nuances, les silences, les contradictions d’un entretien ou les zones grises d’un cahier des charges que se loge la véritable valeur. Et cette valeur-là, aucun modèle statistique ne peut l’inventer.

C’est là que se joue la bascule : l’IA peut produire, mais elle ne comprend pas. Elle associe, mais ne juge pas. Elle propose, sans conscience des conséquences.

Vers une redéfinition du rôle du consultant ?

En pratique, l’arrivée de l’IA pousse les consultants à faire évoluer leur posture. La charge de travail liée à la production « brute » diminue. Mais la nécessité de vérification, d’enrichissement, d’adaptation à un contexte client… elle, augmente.

Ce ne sont plus tant les livrables finaux qui font la valeur, mais la capacité à poser les bonnes questions, à orienter la machine, à interpréter finement les résultats générés. L’intuition, la connaissance du client et la compréhension des enjeux deviennent les véritables leviers différenciants.

Le consultant ne devient pas « remplaçable ». Il devient responsable de l’interprétation, de la validation, et de la justesse de l’approche.

Un exemple concret ? Dans une mission récente (auprès d’un cabinet juridique, que je nommerai ici “Lex & Co” pour préserver la confidentialité), l’équipe projet a utilisé un outil IA pour rédiger une première version d’un cahier des charges destiné à remplacer un outil métier obsolète. La structure proposée était claire, complète, et conforme aux standards.

Mais à la lecture, plusieurs limites ont émergé : des exigences trop génériques, des formulations imprécises, et l’absence de certaines contraintes spécifiques au SI interne du client. Sans relecture attentive et cadrage métier, ce livrable aurait pu induire en erreur les prestataires sollicités.

Sans vigilance, l’outil aurait permis de gagner du temps… mais au prix d’un cahier des charges bancal et difficilement opposable.

Un outil, oui. Une révolution, peut-être.

Dans les faits, l’IA générative s’apparente aujourd’hui à une prothèse intellectuelle : elle renforce, étend, soutient certaines tâches. Mais elle ne remplace ni l’intelligence de situation, ni la capacité à écouter, ni l’éthique du conseil.

L’enjeu n’est donc pas technologique. Il est culturel.

Accepter que l’IA fasse désormais partie du paysage professionnel, c’est une chose. L’intégrer avec méthode, avec sens, en est une autre. Il ne s’agit pas de « suivre la tendance » mais de faire des choix éclairés. Que voulons-nous déléguer ? Que refusons-nous d’abandonner à la machine ? Et comment accompagnons-nous les jeunes consultants dans cet équilibre subtil ?

Une chose est sûre : ne rien faire serait une erreur

Attendre une régulation parfaite, ou un modèle “fiable à 100 %” serait illusoire. L’IA générative évolue trop vite. Elle est déjà là. Et les clients s’y intéressent. Certains la testent, d’autres l’exigent déjà comme levier d’optimisation des missions.

Dans ce contexte, chaque cabinet, chaque consultant, doit faire son propre chemin. Il ne s’agit pas de foncer les yeux fermés, mais d’expérimenter avec lucidité. De s’interroger en équipe. De documenter ses essais. Et surtout, de ne jamais oublier que dans “intelligence artificielle”, il y a surtout le mot artificiel.

Points à retenir :

  • L’IA générative peut accélérer certaines tâches mais ne remplace ni l’analyse critique ni le bon sens terrain.

  • Elle revalorise le rôle du consultant comme médiateur, contrôleur et expert métier.

  • L’adoption doit être réfléchie, structurée et adaptée à chaque type de mission.

  • Le risque n’est pas l’outil en lui-même, mais l’usage que l’on en fait.

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